La philosophie : Les 4 grands axes

Il existe bien évidemment d’innombrables façons d’aborder la pratique d’un instrument, chaque pédagogue ayant sa propre vision de ce qui lui paraît pertinent ou non. Pour ma part, j’ai opté pour un système de travail centré sur 4 axes interdépendants qui me semblent constituer les 4 grands piliers de l’apprentissage de la batterie.

Ce sont :

Je présente tous ces concepts en détail dans cet article mais l’infographie ci-dessous récapitule et synthétise le tout visuellement.

Les 4 grands axes

Si vous débutez, certains concepts vous paraitront certainement un peu obscurs, mais vous pouvez les passer et y revenir plus tard quand vous aurez davantage de recul. Cette introduction a vocation à être relue plusieurs fois au cours de votre apprentissage.

LA TECHNIQUE (T)

La technique est le point de départ indispensable de chaque niveau. Elle se travaille sur un seul élément à la fois. Dans les exercices proposés, j’insisterai principalement sur le travail de la caisse claire (CC) et de la grosse caisse (GC), mais il ne faut pas oublier que tous les exercices proposés peuvent être portés sur n’importe quel élément du kit.

Ces exercices sont souvent qualifiés de gammes dans le jargon de la batterie, car il s’agit de répéter jusqu’à la pleine maîtrise des enchainements « types ».

Exemples d’exercices de caisse claire puis de grosse caisse :

La technique développe les aspects suivants :

Les figures (ou schémas) rythmiques

La batterie consiste « grosso modo » à placer dans l’espace (à savoir les différents éléments sonores du kit – voir coordination et indépendance) et dans le temps (défini par le tempo du morceau) différents coups, le tout de façon « harmonieuse ». Tout est donc question d’espace-temps et de référentiel, comme en Physique 🙂

Pour ce qui est du placement dans le temps, les possibilités étant immenses, plusieurs notes « élémentaires » ont été créées (blanche, noire, croche…), chacune correspondant à une durée précise par rapport au temps de référence. Travailler les figures rythmiques, c’est donc découvrir le solfège rythmique (durée et notation des notes « élémentaires ») tout en apprenant à jouer, c’est à dire placer ces notes correctement.

J’appellerai figure rythmique tout enchainement de notes dont la durée totale équivaut à un temps.

Ces figures s’avèrent indispensables à maîtriser pour qui veut disposer d’un maximum de vocabulaire sur son instrument. Elles représentent en quelque sorte la boite à outils du batteur !

Exemples d’exercices pour découvrir la croche puis la double croche :

Exemple de figure rythmique (durant par définition un temps) comportant une croche et deux doubles-croches :

A noter qu’en batterie, la hauteur d’une note sur la portée n’a pas d’incidence mélodiquement parlant (même s’il y a une certaine logique) : elle sert juste à savoir quel élément doit être joué. Je vous renvoie aux notations pour en savoir plus.

Pour travailler les figures rythmiques, il est conseillé de se munir d’un métronome : il faudra toujours commencer par régler le métronome au tempo le plus faible indiqué puis l’augmenter progressivement afin d’atteindre des tempo plus élevés.

Les combinaisons de figures et les changements de débit

Lorsque l’on mélange différentes figures rythmiques au sein d’une même mesure, on obtient alors une… combinaison de figures ! Ces dernières représentent forcément un champ très vaste à explorer, et si certaines ne serviront qu’à titre d’exercice destiné à vous faire mal au crâne, d’autres se révèleront être d’excellents moyens d’enrichir à terme vos break (ou fills) et vos rythmes (ou patterns).

Exemple de combinaison de figures (ici, 4 figures différentes sont utilisées dans une mesure comportant 4 temps) :

Enfin, dans certains cas, les combinaisons de figures impliquent un changement de débit. Une petite explication s’impose… Observons les 3 figures rythmiques a, b et c ci-dessous :

Créons, à partir de ces 3 figures, les deux combinaisons de figures d et e suivantes :

combinaison d | combinaison e

Les mains utilisées (droite (D) ou gauche (G), c’est à dire le doigté) sont précisées au-dessus des notes afin de mieux comprendre le raisonnement suivant.

La combinaison d est un mélange des figures a et b :

  • la figure a est constituée de 2 croches (dites binaires) qui représentent une durée totale de un temps,
  • la figure b est constituée de 4 doubles-croches qui représentent également un temps (comme toutes les figures…),

Pour passer de la figure a à la figure b, il « suffit » donc de multiplier le nombre de coups par deux, autrement dit de placer deux fois plus de coups sur la même durée. Pour cela, si on regarde le doigté de la figure b par rapport à celui de la figure a, nous allons simplement intercaler la main gauche entre chaque coup effectué à la main droite : ainsi la vitesse du rythme perçu augmente, mais la main droite conserve quant à elle le même débit (même nombre de coups par seconde). Du coup, la combinaison d possède un débit constant à la main droite, ce qui la rend assez simple à effectuer car on dispose en quelque sorte d’un repère fixe.

La combinaison e est un mélange des figures a et c :

  • la figure a est toujours constituée de 2 croches,
  • la figure c est quant à elle constituée de 3 croches (on parle de triolet de croches) : la durée qui sépare chacune de ces 3 croches n’est donc pas la même que celle qui sépare les 2 croches de la figure a.

Pour passer de la figure a à la figure c, il n’est plus possible de simplement multiplier par 2 le nombre de notes jouées en intercalant l’autre main. Vous comprendrez que pour passer d’un temps comportant 2 notes à un temps en comportant 3, il faut nécessairement opérer un changement de débit. Dans l’exemple e, la durée qui sépare deux notes jouées à la main droite variera au cours de la mesure. Lors d’un changement de débit, il sera donc souvent nécessaire d’inverser le doigté, mais nous y reviendrons plus tard… Les changements de débit sont au final plus difficiles à maîtriser que les combinaisons « classiques », mais ils permettent d’enrichir considérablement le jeu.

Ces dernières notions peuvent apparaître complexes à ce stade pour un néophyte, ne perdez pas de vue qu’il ne s’agit ici que d’une introduction très générale et que tous ces concepts seront explicités en détail et pas à pas dans la méthode. Vous les digérerez en temps voulu 🙂

Le doigté (ou l’équivalent pour les pieds)

C’est le dernier aspect fondamental de la technique, que j’ai brièvement abordé dans l’exemple précédent. Le concept est bien plus simple à comprendre mais néanmoins révélateur de toutes les possibilités qu’offre le jeu de batterie.

Reprenons pour l’exemple une figure rythmique simple constituée de 4 double-croches :

Cette notation nous permet de savoir qu’il faut jouer la figure sur la caisse claire et nous donne le placement dans le temps des notes. Toutefois, il n’est pas précisé quelle main doit être utilisée pour jouer chaque coup. Cette précision, appelée doigté, est fondamentale, car le rendu sonore sera différent en fonction des mains utilisées.

On considère en général qu’il existe 3 grands types de doigtés différents à travailler :

  • le frisé (ou l’alternance classique de type DGDG)
  • le roulé (ou « pa-pa-ma-man », de type DDGG)
  • le moulin (ou « paradiddle », combinaison plus évoluée)

Il existe de nombreuses variantes possibles pour le moulin et les plus utiles seront abordées dans la méthode.

Connaître et maîtriser les différents doigtés vous permettra également d’enrichir profondément vos break et vos rythmes à l’usage.

En résumé, le travail de la technique permet d’aborder les rudiments de base sur un seul élément, à savoir :

  • les figures rythmiques & le solfège rythmique
  • les combinaisons de figures et les changements de débit
  • les différents types de doigtés : frisés, roulés et moulins (ou dérivés)

En travaillant la technique, vous assouplirez au passage vos poignets et vos chevilles, gagnant progressivement en précision et en fluidité. Il est donc indispensable de revenir régulièrement sur certaines gammes, mêmes basiques, tout au long de votre vie de batteur (pour s’échauffer par exemple).

L’INDÉPENDANCE (I)

Bon, c’est bien joli tout cela, mais vous ne souhaitez pas forcément passer 2 ans à ne faire que de la caisse claire… La batterie est un instrument qui se joue dans l’espace, il est donc très important de prendre conscience de ce vaste environnement le plus vite possible et de jouer vos premiers rythmes : c’est l’objet de l’indépendance.

Dès lors que connaissez les premières figures rythmiques, il devient possible de les associer et de les jouer « en même temps » à l’aide de vos différents membres sur les éléments sonores du kit. On obtient alors un rythme. Dans un groupe/orchestre, le rythme, de part sa régularité, est l’élément indispensable qui soutient les instruments mélodiques pendant la quasi-totalité d’un morceau.

Comme vous devrez penser à plusieurs membres à la fois pour jouer des rythmes, il s’agit d’un travail d’indépendance corporelle dans lequel le cerveau et la mémoire mécanique du corps seront fortement mis à contribution.

Les gens qui disent : « La batterie, c’est dur, je n’arriverai jamais à jouer plusieurs trucs à la fois ! » redoutent en réalité ce travail d’indépendance. Pourtant, comme pour de nombreuses choses, il faut simplement entrainer le corps par des exercices répétés. On peut d’ailleurs faire l’analogie avec la conduite : au début, on est paumé et on mélange les pédales alors qu’à l’usage, on n’y pense même plus… Il est également intéressant de noter que, lors d’un travail sur un rythme, il arrive couramment que l’on échoue le premier jour et que cela finisse par sortir « tout seul » le lendemain ou le surlendemain. Bref, ne vous découragez pas, bossez et laissez le corps terminer le travail !

Je profite de ce paragraphe pour faire une petite parenthèse : l’ennemi principal du batteur débutant, c’est de ne pas avoir « le sens du rythme ». Il ne s’agit pas ici d’un problème d’indépendance, mais d’un manque de perception des battements (ou temps) dans un morceau. En gros, sans savoir jouer de la batterie, êtes-vous capable de taper du pied à peu près régulièrement et naturellement quand vous écoutez de la musique ? Ressentez-vous aisément les fins de couplets, refrains, etc… ? Si oui, cela va grandement vous faciliter la tâche. Sinon, je ne vous cache pas qu’elle sera bien plus ardue, mais pas d’inquiétude, tout s’apprend si on fournit les efforts nécessaires !!!

Je reprends mon propos initial : il existe deux formes d’indépendance : la relative et l’absolue.

L’indépendance relative

Cette forme représente 90% des rythmes joués en batterie et des exercices qui seront présentés dans cette méthode. Inutile de préciser qu’elle s’avère fondamentale !

Pour l’expliquer, commençons par les modalités de construction d’un rythme de base.

Supposons que vous connaissiez désormais à la caisse claire et à la grosse caisse les figures a et b suivantes :

Vous êtes donc déjà à l’aise avec les concepts de croche (figure a) et de noire (figure b).

La construction d’un rythme simple repose sur les principes suivants :

  • le charleston (hihat) fermé ou une cymbale comme la ride joue (par défaut à la main droite) un ostinato, c’est à dire une figure régulière servant de repère. Ici, nous prendrons la figure a pour créer cet ostinato. L’ostinato est généralement joué sur un élément qui résonne peu afin de bien en discerner les différents coups, d’où le choix commun du charleston ou de la ride. Dans les premiers rythmes travaillés, l’ostinato possède très souvent un débit plus élevé que la CC et la GC : il sert ainsi de point de repère autour duquel on vient greffer les autres éléments.
  • la caisse claire (par défaut à la main gauche) et la grosse caisse viennent compléter cet ostinato et donner vie au rythme en plaçant des coups basés sur la figure b. Dans un rythme pop/rock classique, il est d’usage de placer les caisses claires à des endroits précis (en l’occurrence sur les 2ème et 4ème temps) et les grosses caisses où l’on veut (tout dépend du morceau, de la ligne de basse…). Bien évidemment, tout est possible comme nous le verrons dans cette méthode : il faut savoir briser les conventions à l’usage 😉

Au final, on obtient donc le rythme suivant, l’un des premiers que l’on apprend à la batterie :

Je n’irai pas plus loin dans cette présentation, mais imaginez toutes les possibilités de rythmes qui vont s’ouvrir à vous au fur et à mesure que vous apprendrez des figures rythmiques de plus en plus évoluées.

Dans le cas étudié, vous aurez un travail d’indépendance à fournir pour réussir à jouer ce rythme sans vous mélanger les pinceaux. Mais si l’on regarde de plus près, il y a une logique : toutes les figures utilisées sont des multiples (ou sous-multiples) de 2 : l’ostinato en croches sert de guide pour placer les CC et GC une fois sur deux, en noires. Le rythme se construit donc par rapport à cet ostinato : on parle donc d’indépendance relative. Vos membres ne sont pas totalement dissociés sur le plan rythmique.

L’indépendance absolue

Cette forme est bien plus complexe à apprendre. Vous ne l’aborderez que bien plus tard dans votre étude de l’instrument. Son utilisation en batterie reste d’ailleurs assez marginale et ponctuelle, car le résultat obtenu peut être très moche si mal utilisé (c’est à dire pas bien maîtrisé et peu adapté à l’accompagnement musical). Mais certains batteurs s’en sont faits des spécialistes et parviennent à produire des choses très impressionnantes et originales par ce biais.

L’idée, c’est que vos membres joueront sur les éléments de la batterie des figures rythmiques ayant un débit différent. Ici, pas de point de repère simple, il faut vraiment que le cerveau dissocie les 2, 3 ou 4 membres utilisés. Le seul repère subsistant étant le temps (défini par le tempo), on utilise alors le terme d’indépendance absolue. Chaque élément se réfère uniquement au temps, mais aucunement par rapport à un autre. Évidemment, c’est bien plus dur à jouer !

On obtient par ce moyen des polyrythmes. En voici un exemple « assez simple », joué à la GC et sur un tom alto :

A noter que la polyrythmie peut également se pratiquer entres les instruments d’un groupe : on obtient là un résultat en mon sens bien plus intéressant à travailler et que j’explorerai à l’occasion, puisque je l’ai souvent utilisée dans un groupe de rock progressif.

Une variante intéressante de l’indépendance absolue, et sur laquelle je m’attarderai beaucoup plus dans cette méthode, c’est l’illusion rythmique.

J’en touche un mot ici, mais si vous débutez, vous pouvez passer directement à la partie suivante sur la coordination.

Dans la partie finale sur le groove, j’évoquerai le rôle de l’accentuation, c’est à dire l’importance des coups fort et faible, en bref de la dynamique du jeu. Placer des accents au bon endroit permet d’améliorer le groove d’un rythme.

Dans le rythme ci-dessous abordé dans l’indépendance relative, le fait d’accentuer un coup de charleston sur deux donne un effet plus fin au rendu, plus subtil :

Ce procédé d’accentuation d’un ostinato en croches est d’ailleurs très commun en batterie.

Prenons maintenant un rythme ternaire classique en 12/8 :

Dans ce type de rythme, les éléments sont regroupés par 3, chaque coup de GC ou de CC étant séparé du suivant par 2 croches jouées au charleston. C’est le rythme fondamental du Blues.

La façon naturelle de faire groover ce rythme est d’accentuer les temps au charleston de cette façon (1 coup sur 3) :

Pour corser un peu les choses, on peut vouloir accentuer le charleston un coup sur deux, donnant ainsi l’impression de jouer l’ostinato en croches binaires vu précédemment, tout en maintenant une GC et une CC placées sur une logique ternaire. Le résultat obtenu est dans ce cas un mélange binaire-ternaire et il s’agit d’une illusion rythmique car l’auditeur aura du mal à savoir quelle est la référence :

Il ne s’agit ici que d’un exemple, mais on peut imaginer des illusions rythmiques basées sur d’autres principes, comme le mélange d’un ostinato joué et accentué en 4/4 avec des GC/CC placées sur des mesures asymétriques en 7/8 – 9/8. Le monde des illusions rythmiques est vaste, il donne lieu à des rythmes complexes très intéressants, surtout dans l’hypothèse d’une interaction poussée avec un bassiste ou un guitariste.

En résumé, le travail sur l’indépendance revient à jouer des éléments ensembles et à élaborer des rythmes :

  • l’indépendance relative traite des rythmes conventionnels et des ostinatos les plus utiles
  • l’indépendance absolue vous ouvrira la voie de la polyrythmie et des illusions rythmiques

LA COORDINATION (C)

3ème grand pilier du travail de la batterie, la coordination consiste à enchainer les figures rythmiques apprises en technique sur les différents éléments du kit, tout en restant fluide et précis par rapport au tempo. Contrairement à l’indépendance qui vise à travailler le placement des éléments « en même temps », ils sont joués ici l’un après l’autre. La coordination représente donc en quelque sorte le travail spatial sur l’instrument. Il n’est pas forcément évident quand on débute de passer de la caisse claire au tom basse sans perdre le fill 😀

Il existe plusieurs types de coordination, en voici quelques exemples :

Exercice de technique de CC puis application en coordination GC/CC :

Exercice de technique de CC puis application en coordination CC/toms :

On peut alors imaginer et établir une liste un peu plus exhaustive des coordinations possibles :

  • grosse caisse / caisse claire
  • caisse claire / toms
  • grosse caisse / toms
  • grosse caisse / caisse claire / toms
  • charleston / caisse claire
  • charleston / cymbales
  • charleston / toms
  • etc …

La coordination prend tout son intérêt dans la création des break. Dans sa version la plus simple, un break est une mesure particulière visant à casser le rythme principal, jouée différemment par le batteur et exploitant souvent des éléments plus « invasifs » du kit (comme les toms ou les cymbales crash). Les break sont utilisés lors d’une fin de cycle ou d’un changement de section dans un morceau (passage couplet-refrain, refrain-pont…) : ils permettent d’amener et faciliter ces transitions. En d’autres termes, ils donnent davantage de vie au morceau !

Mais il serait réducteur de limiter la coordination à ce rôle. On peut très bien l’exploiter dans un rythme, en portant (par exemple) une partie d’un ostinato joué initialement au charleston sur des dômes de cymbales ou des toms, et ce afin de l’enrichir en terme de musicalité. J’ai beaucoup développé cet aspect dans mon propre jeu et il en sera donc régulièrement question dans cette méthode. Rien n’oblige à ce qu’un rythme soit uniquement concentré sur le trio GC/CC/HH (même s’il est particulièrement efficace, j’en conviens).

Enfin, la coordination confère une source inépuisable de plans pour construire des solos de batterie.

En résumé, le travail sur la coordination revient à jouer des éléments les uns à la suite des autres, ce qui permet :

  • de construire des break ou des solos
  • d’enrichir les rythmes en leur conférant plus de musicalité

LE GROOVE (G)

Nous y sommes, « last but not least », le groove ! Ou encore le 7ème sens pour les fans de Saint Seiya 😉

Et bien non, justement, je vais essayer de vous démontrer que le groove, c’est également, et surtout, une histoire de travail. Contrairement aux idées parfois reçues, le groove ne se limite pas à « on l’a – on l’a pas ».

S’il est effectivement difficile d’en donner une définition concrète, car il s’agit avant tout d’un ressenti, on peut toutefois très bien identifier différents critères qui permettront de l’améliorer.

Alors, qu’est-ce que le groove ???

D’après Wikipedia :

« Le terme groove vient de l’expression anglaise in the groove (littéralement « dans le sillon ») signifiant « dans le rythme », « dans la note » dans l’argot des musiciens de jazz. Le terme est utilisé dans la musique populaire noire américaine à partir du XXème siècle. Il désigne tout d’abord un « rythme régulier » puis un « jeu inspiré », un « jeu superbe » (d’où le verbe « groover », « jouer de façon inspirée », « jouer magnifiquement bien ») et enfin un style musical, aux sonorités chaudes et au rythme chaloupé… »

Ou encore, un peu plus loin :

« Dans la musique populaire, le terme groove s’applique en premier au rythme, un terme utilisé en référence à la mesure et à l’embellissement des sections rythmiques. Richard Middleton (1999) le décrit ainsi : le concept de groove (un terme qui n’a été théorisé par les analystes que très récemment, mais qui était utilisé depuis longtemps par les musiciens) marque une compréhension du flot et de la texture rythmique et souligne son rôle en produisant une sensation et une dynamique particulières au morceau. Une sensation créée par la répétition de trames rythmiques dans laquelle des variations peuvent avoir lieu. »

Bref, beaucoup de blabla (c’est moi qui dis ça…) et de guillemets, mais vous aurez compris l’idée ! On peut aussi penser à la définition donnée par les Inconnus s’ils avaient fait allusion aux batteurs et non aux guitaristes…

Après avoir longuement réfléchi sur le sujet, j’en suis venu à la conclusion que le groove reposait sur 3 aspects :

  1. La fluidité
  2. La dynamique
  3. La mise en place
  4. Le « feeling » du batteur ???

Allez, c’est parti, je vous détaille tout cela…

La fluidité

Pour qu’un rythme « sonne », il est tout d’abord nécessaire que vos mouvements soient fluides. Si vous êtes tendu, vous jouerez de façon hachée et le rendu sera mauvais. Pour améliorer la fluidité, il faut :

  • avoir une très bonne souplesse des poignets et des chevilles, ce que vous obtiendrez en travaillant la technique,
  • penser à respirer en jouant : votre respiration doit s’harmoniser avec votre jeu, ne jouez pas en apnée !!! La batterie possède une dimension physique, on ne peut pas la négliger, que ce soit dans l’endurance ou dans la position à tenir (pour éviter des problèmes de dos, tendinites…). Si vous êtes quelqu’un d’anxieux, n’hésitez pas à pratiquer quelques exercices de respiration avant de vous mettre derrière le kit. Votre corps vous remerciera et votre groove sera bien meilleur si vous êtes « posé ».

Ceci étant dit, je vous renvoie donc à la section technique pour cette partie du travail. Il n’y a pas à proprement parler d’exercices de fluidité dans la section groove de la méthode. Et n’oubliez pas de penser régulièrement au second point concernant la respiration.

La dynamique

L’autre facteur pour qu’un rythme « sonne », c’est de jouer sur la dynamique, c’est à dire de travailler les accents (coups forts) et les ghost notes (coups faibles = notes suggérées). Je vais être franc : sans cela, vous jouerez comme une machine des années 80, sans nuance, sans finesse.

Bien entendu, la dynamique se travaille ! Les exercices que vous trouverez dans la section groove de la méthode seront principalement portés sur ce point : ils vous permettront d’apprendre à placer des accents ou des ghost notes au bon endroit sur les différentes figures rythmiques et rythmes que vous aurez acquis au préalable.

Les exercices présents dans ces pages seront de deux natures :

Le bloc F (pour Figure)

Le bloc F consistera toujours à travailler l’accentuation de façon basique sur une figure rythmique donnée et donc sur un seul élément (comme la caisse claire) : à considérer comme une extension directe de la technique pour un niveau donné, il vous faudra absolument vous y atteler avec rigueur au fur et à mesure (c’est à dire en parallèle des exercices effectués sur la technique, l’indépendance et la coordination).

Voici un exemple : la première mesure est un exercice de technique de CC, la seconde une application avec accents dans la section groove.

Le bloc R (pour Rythme)

Le bloc R consistera à exploiter l’accentuation dans les rythmes. Ce travail est tout aussi important mais pourra poser problème aux débutants car il nécessite une certaine souplesse des poignets (que l’on n’a pas forcément au début) et un travail supplémentaire d’indépendance (quand on place des accents, il faut réfléchir un peu plus…). Autrement dit, vous pourrez vous permettre d’avoir un peu de retard sur ces exercices par rapport au reste de la méthode et y revenir plus tard quand vous vous sentirez plus à l’aise. Par contre, pour ceux qui ont déjà un certain niveau et qui veulent améliorer leur groove, c’est peut-être de ce côté-là qu’il faudra se pencher… Enfin, si vous avez bien suivi, ce travail aboutira à partir d’un certain stade aux illusions rythmiques évoquées dans un précédent paragraphe.

Voici un exemple : la première mesure est un exercice d’indépendance, la seconde une application avec accents dans la section groove.

La mise en place

On entend souvent dire : « Ce batteur joue bien en avant (ou au fond) du temps, ça groove à mort ! ».

Effectivement.

Sauf que pour bien jouer « en avant » ou « au fond », en bref s’amuser avec le métronome qui lui est imperturbable par essence, et bien il faut, aussi bizarre que cela puisse paraître, commencer par l’être également (imperturbable).

La première règle (du Fight Club), c’est donc de pratiquer tous les exercices de la méthode avec un métronome (pas forcément tout le temps, mais le plus souvent possible). Dans le même ordre d’idée, à chaque fois que vous travaillez un morceau d’un groupe, tâchez de bosser avec un casque sur un playback carré. Vous pouvez également vous enregistrer, si possible avec d’autres musiciens, et vous comprendrez vite… Un batteur ne doit ni accélérer, ni ralentir (sauf si le morceau le nécessite bien sûr).

La seconde règle, c’est de bien respecter l’intervalle de tempo donné dans les exercices et de commencer systématiquement par travailler au tempo le plus faible avant de booster progressivement le métronome. Il est toujours plus difficile de jouer et faire sonner un plan à bas tempo qu’à un tempo medium ou élevé.

Si vous suivez ces deux règles, vous aurez à terme une mise en place en acier, et vous pourrez commencer à déjouer le métronome, en l’anticipant un peu ou en jouant bien au fond du temps. A ce moment-là, vous commencerez à groover et à vous forger votre identité ! Mais pas de panique, il faut souvent quelques années de pratique pour cela…

Pas d’exercice particulier pour la mise en place, il suffit de travailler le reste de la méthode en suivant bien ces deux consignes.

Le « feeling » du batteur

On peut parfois se dire qu’un de nos potes batteur a un super « feeling«  et ressentir un fort découragement à chaque fois qu’on l’entend jouer. On rentre penaud avec l’envie de tout arrêter…

Je l’ai dit précédemment, le groove, cela se travaille ! Avoir du feeling, c’est en fait avoir une bonne fluidité, un bon contrôle de la dynamique et une mise en place parfaite et personnelle. Or, de quoi a-t-on parlé juste avant ? Hum ???

Effectivement, certaines personnes ont un peu plus de chance (de « talent ») au départ et semblent accéder assez naturellement à ces critères. Cela ne signifie pas que vous n’y arriverez pas, il vous faudra juste travailler davantage.

Et vous avez peut-être d’autres qualités dans votre jeu que ces derniers n’ont pas (car les doués sont parfois fainéants !).

Pour illustrer mes propos, je pense à deux batteurs célèbres : Manu Katché (que l’on ne présente plus) et Gavin Harrison (batteur de Porcupine Tree, King Crimson…). Je précise que j’adore les deux et qu’ils ont dû, tous les deux, bosser leur instrument comme des dingues. Mais en les étudiant, j’ai le sentiment que Manu Katché avait déjà un feeling incroyable au départ (qu’il a bien su exploiter et développer) alors que Harrison ressemblait plus à « monsieur tout le monde », à savoir qu’il a atteint ce stade d’excellence dans le groove par un travail de fond énorme et précis sur tous les critères que j’ai déjà cités. Bref, ce n’est peut-être qu’une impression erronée, mais cela donne une image 🙂

En résumé, le groove repose sur :

  • une bonne fluidité issue de la technique et de la respiration
  • un bon contrôle de la dynamique (accents et ghost notes), aussi bien sur les figures que dans les rythmes
  • une bonne mise en place (travail au métronome)

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